La lettre de Fernand Dédeh Tagro à BIZ
- DS News
- Oct 30, 2020
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À Barthelemy Zouzoua Inabo: #Electiontour: Jour J-1. Le jour le plus long. Suivi de la nuit des longs couteaux. Ou disons, quelque soit la longueur de la nuit, le jour apparaît. Nous y sommes. Nous sommes à la veille du 31 octobre 2020. Les ventres se nouent. Pouvoir et Opposition ont campé sur leurs désaccords. La voix venue de Bruxelles a indiqué une direction. Celle du dialogue. Laurent Gbagbo est apparu fatigué, essoufflé. Il est apparu dans le costume du conseiller politique pour la classe dirigeante ivoirienne.
Laurent Gbagbo: « En Démocratie, on se donne des règles et on les respecte.»
« Négocier, discuter, se parler. Il est toujours temps de le faire... »! Laurent Gbagbo a parlé. Il a accepté de rompre le silence le plus bruyant, pour donner sa direction. « Celle que je crois être la bonne. », dit-il. Et la bonne direction, c’est celle du dialogue. Le dialogue, « l’arme des forts », selon Felix Houphouët-Boigny. C’est un Laurent Gbagbo, affaibli, aux débit et gestes lents, la voix un peu lourde, mais calme, l’esprit vif et le verbe offensif que les Ivoiriens ont revu sur les antennes de TV5, ce jeudi 29 octobre 2020, à 48 h de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. « Ce qui nous attend, c'est la catastrophe et c'est pourquoi je parle. Pour qu'on sache que j'ai parlé. Pour qu'on sache que je ne suis pas d'accord pour aller pieds et poings liés à la catastrophe. Pour qu'on sache que je dis qu'il y avait autre chose à faire. Il faut discuter. ». Celui que ses partisans appellent « le père du multipartisme en Côte d’Ivoire », s’appuyant sur son expérience, a donné des conseils à la classe politique ivoirienne mais aussi passé un message à la communauté internationale: aider les Ivoiriens à se parler. « S’asseoir et discuter ». Ceux qui attendaient l’ancien président de la République au rond point du verbe vindicatif et cassant, ont bien été déçus. On peut dire son opinion, sa vérité, avec conviction mais avec élégance. « ll faut une auto éducation. Il faut que les gens comprennent que dans la démocratie on se donne des règles... Et une fois qu'on s'est donné des règles, il faut les respecter. C'est ça. Il faut les respecter. Si on ne peut pas respecter les deux mandats, qu'on ne l'écrive pas dans la constitution. ». La position de l’ancien prisonnier de la Cour pénale internationale est ainsi connue: résolument du côté de l’opposition.
En attendant...
La campagne pour la présidentielle a pris fin ce jeudi 29 octobre 2020. Le candidat du RHDP, Alassane Ouattara était à Abobo. Il a mobilisé ses partisans pour le vote le 31 octobre 2020. Il y avait caravane et N’domolo au programme. ADO tient à son Takokelé, le coup KO. Les responsables du parti présidentiel encouragent d’ailleurs, « toute la jeunesse du rhdp à aller voter tôt le matin, dès les premières heures, le 31 octobre 2020. ». Après cet acte civique, ajoutent-ils, « ils doivent former des cordons autour des lieux de vote pour en assurer la sécurité. Ils doivent rester fermes mais pacifiques. ». Bon, ce n’est pas vraiment le rôle des militants d’assurer la sécurité des bureaux de vote. Les FDS sont formées et présentes pour ça! C’est ainsi commencent les confusions et les palabres... Le candidat Konan Kouadio Bertin était lui à la place inshallah de Koumassi pour le meeting de clôture de sa campagne. « Vous êtes suffisamment murs et formés pour assumer vos responsabilités dans ce pays. Le samedi 31 octobre 2020, allez massivement aux urnes, pour sauver la Côte d’Ivoire. Pour libérer la Côte d’Ivoire. », a lancé le candidat en violet à ses sympathisants et partisans.
Les craintes de la CEI
Les électeurs ivoiriens en Italie ne pourront pas voter. L’administration dans ce pays, a annulé les opérations de vote, le 31 octobre 2020, en raison de la Covid19. La France est en pointillés. L’ambassadeur de la Côte d’Ivoire en France, Maurice Bandama a rassuré les électeurs: « Le scrutin aura lieu. Les autorités françaises travaillent aux dispositions pratiques à mettre en œuvre afin de permettre le bon déroulement du scrutin du 31 octobre dans le strict respect des mesures barrières liées à la pandémie de la COVID-19. ». Selon nos informations, les autorités françaises ne sont pas favorables. Les Ivoiriens tentent de forcer les portes. En Côte d’Ivoire, la Commission électorale indépendante assure que les dispositions à son niveau sont prises pour l’organisation du scrutin. « Nous faisons notre part, que l'Etat fasse la sienne dans la sécurisation. Le matériel est dans les chefs lieux en attendant la veille ou le jour du scrutin pour être déployé dans les lieux de vote. ».
Finalement...
Les positions sont restées figées. Alassane Ouattara et Kouadio Konan Bertin aux urnes. Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’guessan, dans la désobéissance civile. La grosse interrogation, que va-t-il se passer dans les régions et les centres de vote ce samedi 31 octobre 2020? Ou plus concrètement, comment la désobéissance civile va-t-elle s’exprimer sur le terrain? La quiétude dans le pays, le jour de l’élection, dépend de la réponse à cette question.
Encadré/Violences pré-électorale: Des Ivoiriens fuient Abidjan
« Monsieur, je voudrais vous le dire, je suis à Accra, au Ghana, depuis ce jeudi 29 octobre 2020. ». La jeune dame qui m’informe ainsi, est une internaute active sur les réseaux sociaux. « Je ne supportais plus le stress, les discours vindicatifs et les violences. ». Elle a embarqué sa petite famille, cinq personnes au total, pour se mettre à l’abri. Passage sur l’eau, à partir d’Assinie. Puis, le parcours de combattant à l’intérieur du Ghana. « Beaucoup d’autres ivoiriens, qui fuient le pays, n’ont pas eu la même chance que ma famille et moi. Ils ont été contraints de rebrousser chemin par les forces de sécurité ghanéennes. ». Elle raconte son calvaire. Les passeurs, puis le chauffeur de la voiture ont fait le reste. Les barrages sur la voie, à l’intérieur du Ghana, jusqu’à Takoradi se sont multipliés. Nous avons été informés que les autorités ghanéennes ont donné instructions pour empêcher l’exode massif des Ivoiriens. Grâce à Dieu, nous avons pu franchir les différents barrages. Nous sommes arrivés à Accra. Avec le strict minimum. ». En Côte d’Ivoire, beaucoup quittent Abidjan et regagnent leurs villages respectifs. Le traumatisme des violences de la crise-post électorale en 2011, refait surface. Un jeune cadre qui a quitté Abidjan ce jeudi 29 octobre en direction de Bouaké raconte ses premières impressions, dans la capitale du Gbêkè: « Les gens ici ne se sentent pas concernés par les tumultes d’Abidjan. La vie est normale. ». Il a suivi les derniers instants de la campagne électorale à Bouaké. « Le constat, c'est que la population de Bouaké regarde de loin, sans se mêler. Ça se passe dans l’indifférence générale ou presque. Mais la situation est paisible et bon enfant. ». Une élection ne devrait pas inspirer la peur. Voter est un devoir civique. Choisir les dirigeants, investis de la mission de développement du pays et de l’amélioration du cadre de vie des populations et de l’environnement des affaires, devrait être une fête, un acte de conscience. Malheureusement, les profondes dissensions entre le pouvoir et l’opposition, les tensions sur le terrain, les violences constatées, les affrontements ayant entraîné morts d’hommes et destructions de biens, angoissent les électeurs. On l’a appris, tard dans la nuit, le cortège du ministre d’Etat, Secrétaire général de la présidence, Patrick Achi, de retour d’un meeting a essuyé des tirs des assaillants non identifiés au niveau du village d’Agbaou, sur l’axe Akoupé-Adzopé. Il est sain et sauf. Il a poursuivi ses meetings, la nuit, dans les villages. C’est vrai, la confusion règne quant à l’origine des coups de feu. Certains parlent d’erreur de manipulation de sa garde. D’autres de coups de fusils calibre 12... Mais à 48 h du scrutin, cela a de quoi faire flipper...
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